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De l'intervention militaire française au Mali


Il y a une semaine, le gouvernement malien, aidé par la France, a décidé de mettre fin à cette drôle de guerre où il se contentait d’un statu quo qui permettait aux djihadistes d’occuper les deux tiers du territoire de ce pays et d’y faire la loi -- la charia pour être plus précis, la pluie et le beau temps. Ce cirque durait depuis dix mois ! AQMI, Ansar Dine et le MUJAO épaulés par Boko Haram et des miliciens shebbabs, enhardis par les multiples tergiversations de la communauté internationale et la flagrante faiblesse de l’armée malienne, tentent un coup de force pour descendre vers Bamako et devenir ainsi les maîtres absolus du Mali.

Le Mali, face à cette menace, fait appel à la France qui réagit promptement et efficacement en empêchant la perte de Mopti, dernière verrou stratégique avant Bamako. Sur la même lancée, la campagne militaire de reconquête du Nord-Mali est lancé avec une avance de six mois (sic) sur le calendrier onusien. Au début, les réactions sont positives: une plus que large majorité empirique de Maliens soutient la France, Boni Yayi le président en exercice de l’Union Africaine cache à peine son émotion, la CEDEAO accélère la mise sur pied d’une force armée panafricaine pour aller prêter main forte au Mali et à la France.

Mais passés les premières heures et jours de l’intervention française, voilà la cohorte d’(pan)africanistes, d’anti-néocolonialistes et d’afrosouverainistes qui sortent du buisson comme les escargots sortent de leurs cachettes après la pluie. Et on se remet à nous rabâcher les oreilles en nous ressortant des poncifs du genre néocolonialisme, françafrique ou «la France n’agit que par intérêt». Ces préciosités idéologico-rhéthoriques ne sont pas que l’apanage d’Africains lambdas utilisateurs actifs de Facebook. Vous avez aussi Mme Aminata Traoré, celle que des médias qualifient de passionaria de l’altermondialisme africain, qui trouve moyen d’imputer à la France les déboires du Mali en l’accusant d’avoir instrumentaliser le MNLA. Voilà à quelle déchéance intellectuelle peut mener l’altermondialisme !

A quoi sert-il de les faire comprendre que parler d’initiative française pour préserver son pré-carré et son réseau françafrique est une ineptie perlée ? Soit ils ignorent l’histoire politique du Mali, soit ils en ont oublié des larges portions qui montrent bien que les présidents Maliens, depuis Modibo Keita le premier d’entre eux, ne doivent en rien leur ascension et leur maintien au pouvoir à Jacque Foccard et ses réseaux ténébreux ou à un quelconque autre responsable de la cellule africaine de l’Elysée. Qui pis est, Modibo Keita était à maints égards comparable, bien sûr la dérive dictatoriale sanglante en moins,  au Guinéen Sékou Touré -- l’homme qui osa dire “Non”, face à face, à l”Union Française de De Gaule.    

Peu importe que des “pécheurs” cessent d’être amputés, lapidés ou fouettés. Peu importe que des femmes islamiquement incorrectes ne soient plus violées ou violentées au mieux. Peu importe que des dizaines de milliers d’habitants de Mopti, qui s’apprêtaient à fuir leur ville pour gonfler les rangs des 150 000 réfugiés et 230 000 déplacés maliens, se réjouissent de l’arrêt net de l’avancée islamiste. Peu importe que les mausolées de Tombouctou, patrimoine culturel inestimable, ne soient plus systématiquement détruits par les barbares barbus d’Allah. Ce qui importe surtout à ces afrosouverainistes est de mettre la France et l’Occident sur le banc des accusés. Et nous pouvons toujours compter sur leurs esprits aiguisés à la lime de la mauvaise fois pour nous produire des chefs d’accusation qui finiront par impressionner les jurys populaires des opinions publiques africaines.

A l’occasion des grandes messes panafricaines telles que les sommets de l’Union Africaine, nos dirigeants relayés par maints intellectuels nous serinent qu’il est temps que l’Afrique règle elle-même ses problèmes. Par sa réponse au test malien, l’UA a montré que ce temps-là continuait encore à évoquer le futur. J’aurai de loin préféré que ce soit des forces militaires africaines qui prennent les devants pour éliminer la menace islamiste. Mais les Maliens de Tombouctou, Gao ou Kidal n’ont certainement plus la force de s’embarrasser de subtilités géostratégiques.

En 2004, l’Afrique réclamait à cor et à cri un siège de membre permanent avec droit de véto au conseil de sécurité de l’ONU. Au vue de la (non) réaction des puissances africaines face au conflit malien, je suis conforté dans mon opinion selon laquelle l’Afrique est en encore bien loin d’être une solution aux problèmes d’insécurité mondiale.

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