Le 11 février 2013, le pape Benoît s’est
pris pour un président dont le mandat électif est limité dans sa durée. A la
surprise générale, il a annoncé sa démission. Le jour d’avant, c’est-à-dire le
10 février 2013, Biya’a bi Mvondo Paul Barthélémy de la république bananière
du Cameroun a discouru comme un président qui se prend pour un pape. Du moins
pour un pape qui ne peut démissionner selon ce que croyait le grand public peu au fait du droit canon. Ainsi donc, le président s’adressait à la jeunesse
camerounaise à l’occasion de la fête de la Jeunesse du 11 février. Le thème de
cette célébration était : “Responsabilité patati et participation au
développement patata”.
Comme pour se convaincre qu’il était
encore à la fleur de l’âge, Biya bi Mvondo se tenait debout et n’avait entre
ses mains aucune note pour dire son discours. J’imagine que les thuriféraires
du Renouveau ont fait preuve du zèle éhonté dont ils ont seuls le secret pour
nous convaincre dans les médias que notre président était encore bien alerte
malgré ses 80 printemps bien sonnés. Je suppose qu’ils n’ont pas relevé que le
(seul ?) mérite du président était de pouvoir encore s’aider de téléprompteurs.
A ce propos, je me garderai de moquer notre président puisque Obama qui est
bien plus jeune en use pour s’adresser à des élèves de l’école primaire.
De moins en moins fan de foot, je me
suis échiné à synchroniser une radio camerounaise qui diffusait l’allocution
présidentielle en lieu et place de la finale de la coupe d’Afrique des nations.
En vain. D’ailleurs, ce qu’avait à dire le président n’intéressait pratiquement
personne, du moins dans mon voisinage. La finale de football recelait bien plus
d’incertitudes que le verbe biyaen. Après 30 discours annuels de la sorte, il n’y
avait pas matière à s’attendre à du nouveau. Cela dit, si les Super Eagles du
Nigeria sont devenus champions d’Afrique comme l’avaient pronostiqué la
majorité des bookmakers, le discours de Biya’a
bi Mvondo fut le plus creux et le plus plat que j’ai jamais eu l’occasion
d’écouter.
Le président a donc promis la création
de 200 000 emplois. Il y a deux ans, il promettait le recrutement de 25 000
jeunes dans la fonction publique. Ce fut la plus formidable opération
d’enfumage de citoyens camerounais menés par le gouvernement. A cette
époque-là, les jeunes camerounais, qui ont peu leurs pareils en matière
d’indolence politique et d’inconscience civique, s’étaient mis à rêvasser d’un
printemps camerounais à la suite des printemps arabes. Mais quand Biya’a bi Mvondo
a présenté l’appât de la promotion sociale par l’intégration à la fonction
publique, ils ont tous -ou presque- mordu goulûment à l’hameçon. Selon toute vraisemblance,
sur 25 000 postes promis, seulement 4 000 furent attribués et le calendrier de
recrutement ne fut aucunement respecté.
Cette fois, Biya’a bi Mvondo n’a pas
donné de modus operandi. Va-t-il user d’un décret loi créant ces 200 000
emplois? Je n’y crois pas vraiment: notre président est certes d’une
fainéantise notoire mais il est loin d’être bouffon à ce point-là. Va-t-il
ordonner à l’administration fiscale de lever le pied sur le matraquage
systématique des jeunes camerounais qui ont choisi la voie de entrepreneuriat
privée plutôt que celui du fonctionnariat public? Faut pas rêver: le président
passe presqu’autant de temps en Suisse qu’au Cameroun n’est certainement pas au
courant des dures réalités que vivent nos opérateurs privés. Et même s’il en
avait connaissance, priverait-il ses “commis de l’État” de prébendes résultants
d’une corruption sans laquelle le Renouveau n’aurait pas tenu aussi
longtemps?
Si bien avant l’âge de six ans j’avais
cessé de croire au Père Noël, il m’a fallu encore bien du temps pour cesser
d’accorder à priori toute crédibilité au boniment présidentiel bien que je me
déclarais déjà opposant intransigeant. Quand le 10 février 1999, Biya’a bi Mondor
annonça la désormais gratuité de l’enseignement primaire, je saluai
instantanément cette décision en applaudissant. Et quant je dis “applaudir”,
c’est bien dans le sens propre. Quelques mois plus tard, je déchantais: les
parents, pour inscrire leurs enfants dans les écoles primaires, devaient s’acquitter
de frais non réglementaires qui avaient grimpé en flèche. Notre président
pouvait bien plastronner à l’UNESCO, mais dans les faits l’école payante
restait aussi payante qu’avant.
Le Cameroun ressemble à un bateau dont
le capitaine se prélasse paresseusement dans le lit de sa cabine. Les
moussaillons se dérouillent comme ils peuvent pour faire avancer le navire en
évitant les écueils. Ayant renoncé à évincer le capitaine fainéant, ils préfèrent
errer dans les mers calmes. Approcher les côtes serait trop dangereux sans un
capitaine capable.
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